Eloge de la fuite – Henri Laborit

2 juin 2018

Henri Laborit fût un célèbre médecin chirurgien et neurobiologiste. Il a réalisé des inventions en matière d’anesthésie. C’était un spécialiste dans le domaine du cerveau humain.

Il est connu pour sa vulgarisation scientifique et a participé au film Mon oncle d’Amérique d’Alain Resnais.

Eloge de la fuite est un essai qui reprend les principales idées d’Henri Laborit concernant la condition humaine, le fonctionnement de l’Homme.

C’est un ouvrage plutôt pessimiste, puisque selon Laborit, nous ne sommes pas libres, mais nous dépendons de la somme de nos conditionnements, dont nous ne nous apercevons pas, en particulier ceux du domaine de l’inconscient.

Il existe une règle de base qui régit l’Homme ainsi que les animaux avant lui : le besoin de dominer.

Quoiqu’on en pense, chacun a besoin de dominer l’autre. C’est intrinsèque à chaque individu. Cela nous vient du plus profond de notre cerveau primitif et c’est une valeur commune que nous partageons avec le reigne du vivant.

Dominer.

Mais on ne peut pas toujours dominer ! Que faire quand on est dominé ?

Pour Laborit, il reste dans ce cas la défense ou la fuite.

Néanmoins, l’Homme possède grâce à son cerveau développé une autre échappatoire : la fuite par le biais de l’imaginaire. L’Homme a la capacité, notamment par la création artistique, de s’échapper dans un autre monde, celui de son choix et de sa propre construction.

Laborit alerte sur les méfaits des médias qui annoncent des actualités sur lesquelles on n’a pas de prise. Cette impossibilité d’agir rend de fait malade.

Dans ce livre éminemment scientifique, Laborit ajoute l’étude de la Foi. Sans juger de celle-ci, il en étudie le principe. Il explique ce que lui apporte le Christ et tout l’intérêt du message chrétien – loin de toute organisation religieuse dominatrice ou idéologie politique – dans le renversement des principes de domination. Qu’il soit réel ou imaginaire ou fantasmé, de fait, le Christ libère. Laborit souligne la surprenante permanence de son message malgré l’ancienneté de celui-ci.

Henri Laborit semble penser que l’humanité court à sa perte en détruisant son environnement planétaire, ce qui n’empêchera pas la résurgence de la vie après l’être humain.

Eloge de la fuite n’est pas un livre amusant. Sa fatalité est même déprimante. Pourtant c’est aussi une brique positive. En effet, l’éducation à la connaissance de nos comportements humains peut nous permettre de passer à un autre stade évolutif. Savoir que nous cherchons tous naturellement à dominer est un moyen de mieux contrôler ses sentiments, de mieux comprendre ceux des autres. Et cela rejoint le message du Christ.

Ce livre, édité en 1976, paraît très récent face aux problématiques évoquées, comme l’écologie et la destruction de l’environnement. C’est certainement également un effet de la pertinence de ses arguments.

Eloge de la fuite est plus que d’actualité face à la société contemporaine matérialiste et aux burn-out notamment. Ces derniers ne sont-ils par un résultat de cette inadéquation entre sentiment de liberté, domination dans le travail, et poids de charges démesurées de la vie familiale. Alors, comme l’explique bien concrètement Laborit, s’il n’est pas possible de s’échapper ou de se défendre, il reste la création artistique imaginaire, et la Foi dans le Christ, le renversement des absurdes hiérarchies terrestres.

Un commentaire

  • Armelle BARGUILLET 12 juin 2018 à10 h 03 min

    Marcel Proust a très bien analysé la nécessité de la fuite qui est d’abord une fuite ou une évasion intérieure, là où réside l’essentiel car la vraie réalité est celle que notre imagination recompose et transcende. N’est-ce pas la force de notre esprit qui est en mesure de surmonter nos tares, n’est-ce pas la puissance de notre pensée qui nous délivre de notre enfermement psychique et nous permet de passer outre aux contraintes de l’espace et du temps ?